« Le réseau de l’éducation sans employé-es de soutien, c’est comme une voiture sans essieux; ça ne fonctionne pas. » C’est ce qu’affirme Annie Charland, présidente du Secteur scolaire de la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP – CSN), à la veille d’une rentrée scolaire qui s’annonce difficile, voire chaotique dans certaines régions.
Des services aux élèves compromis
La fédération, qui représente le plus grand nombre d’employé-es de soutien dans les écoles et les centres du Québec, se dit extrêmement préoccupée par la situation actuelle et par l’attitude nonchalante du gouvernement. « Le ministre Roberge doit absolument enlever ses lunettes roses, ça presse. La pénurie de personnel dans les établissements scolaires est importante partout au Québec. Selon les chiffres que nous avons recueillis au cours de la dernière semaine, il manque plus de 1 500 employé-es de soutien dans le réseau. Dans certaines régions, on frôle même la catastrophe. L’impact sur les élèves est inévitable ».
Mme Charland rappelle que le personnel de soutien scolaire est majoritairement en service direct à l’élève (services de garde, éducation spécialisée, surveillance d’élèves, etc.) et que, même quand il n’est pas en service direct, comme le personnel d’entretien et administratif, il participe grandement à créer un environnement sain et sécuritaire qui favorise les apprentissages.
La présidente du secteur signale que la pénurie se manifeste dans plusieurs classes d’emploi. La situation est toutefois particulièrement critique pour les techniciennes en éducation spécialisée et les éducatrices en services de garde. Dans le Centre-du-Québec, seulement pour le Centre de services scolaire Chemin-du-Roy qui couvre la région de Trois-Rivières, il manque actuellement 185 éducatrices. Dans la région de Québec – Chaudière-Appalaches, pour le Centre de services scolaire des Navigateurs, 140 postes d’éducatrices sont vacants. « Au Québec, nous avons choisi collectivement de nous doter d’un système de services de garde éducatifs. Pour jouer ce rôle adéquatement, nous avons mis en place des mesures précises, par exemple des ratios d’élèves et l’embauche de personnel qualifié. Il est évident qu’avec la pénurie actuelle ces mesures ne seront pas respectées et que le volet éducatif écopera. Quand on pense que, dans une journée, bon nombre d’enfants passe presque autant de temps au service de garde qu’en classe, il y a lieu de s’inquiéter. »
Mme Charland ajoute qu’afin d’éviter les bris de services, la charge de travail du personnel restant dans les établissements explosera, ce qui provoquera assurément une augmentation des absences pour épuisement professionnel et participera à l’exode des travailleuses et des travailleurs. « Nous sommes dans l’œil du cyclone. Nous devons en sortir pour le bien des enfants que nous accompagnons au quotidien dans leur parcours scolaire. »
Du bon bord
« Le gouvernement doit, enfin, prendre le bord des travailleuses et des travailleurs du secteur public », lance Frédéric Brun, 2e vice-président de la FEESP-CSN. Pour M. Brun, la situation actuelle confirme ce que la fédération évoque depuis des années. « Les réseaux publics ne sont plus des secteurs d’emploi de choix. Et c’est particulièrement vrai pour les emplois de soutien du réseau de l’éducation qui souffrent d’un manque flagrant de reconnaissance. »
La FEESP-CSN, qui consulte présentement ses quelque 40 000 membres du secteur public sur les demandes à formuler en vue de la prochaine négociation, réitère qu’il n’y a qu’une façon de régler, une fois pour toutes, les problèmes d’attraction et de rétention du personnel de soutien dans les établissements scolaires : investir les montants nécessaires pour améliorer concrètement les conditions de travail et les salaires. « Si l’école est réellement une priorité pour les Québécoises et les Québécois, nous devons valoriser toutes ses composantes. Les employé-es de soutien sont essentiels au bon fonctionnement du réseau. Sans elles, sans eux, la réussite scolaire de nos enfants est compromise », conclut Frédéric Brun.