Article dans LE.POINT.SYNDICAL, numéro 12
« On fait quoi avec un gouvernement qui nous prend de haut comme ça, qui refuse d’écouter ? »
Voilà un peu plus d’un an déjà, le Front commun et ses organisations membres déposaient leurs demandes aux différentes tables de négociation en vue du renouvellement des conventions collectives du secteur public. Devant l’inflexibilité du gouvernement depuis ce dépôt, la grève se pointe maintenant le bout du nez.
Des demandes qui sont souvent des solutions à des problèmes vécus depuis longtemps sur le terrain, dans les établissements de santé et de services sociaux, dans les écoles et dans les collèges. Les solutions n’ont aucun impact si elles sont proposées à un gouvernement qui, dans ses meilleures semaines, se contente d’observer la chute de nos réseaux publics. « On fait quoi avec un gouvernement qui nous prend de haut comme ça, qui refuse d’écouter ? ». Une question lancée par François Enault, 1er vice-président de la CSN et responsable de la négociation du secteur public, à laquelle il s’empresse de répondre : « On l’oblige à bouger, on lui montre toute l’ampleur de la force de frappe des 420 000 travailleuses et travailleurs du secteur public ».
Celles et ceux qui aident ont besoin d’aide
À compter de mars 2020, les services publics ont été propulsés malgré eux au-devant d’une crise sanitaire sans précédent. « Au cœur de la crise, le Québec a réalisé toute l’importance qu’ont nos services publics. Des “ anges gardiens”, voilà ce qu’on a dit des femmes et des hommes qui ont tenu le Québec à bout de bras », rappelle François Enault. « Si la population s’en souvient et en est encore reconnaissante, M. Legault et la CAQ ont rapidement oublié tout le travail accompli quand est venu le temps de discuter des améliorations à apporter aux conditions de travail et au salaire de ces centaines de milliers de personnes », poursuit-il.
Des solutions sur la table depuis un an déjà
Le 28 octobre 2022, plus de 2000 membres étaient venus accompagner les porte-paroles du Front commun au dépôt des demandes syndicales. « Dès cet instant, on sentait déjà la grogne », indique François Enault. « Deux mille personnes à l’étape du dépôt, c’est un signe clair, mais le gouvernement ne l’a pas entendu et, un an plus tard, il ne l’entend toujours pas ».
Alors que la crise sanitaire a exacerbé les enjeux et les défis qui touchent les salarié-es des réseaux publics, il aurait été normal de s’attendre à ce qu’au moins quelques-unes des solutions proposées soient accueillies avec bienveillance, sinon avec un peu d’écoute. « C’est insultant ! La partie patronale est au courant des problèmes, tout le monde connaît les problèmes, on en parle dans les médias chaque semaine », s’insurge François Enault, « mais quand les gens sur le terrain proposent des solutions, les patrons font la sourde oreille ».
Des dépôts patronaux qui frisent le ridicule
À la fin de décembre 2022, la présidente du Conseil du trésor, Sonia Lebel, et les comités patronaux de négociations présentaient leurs « offres » aux syndicats. Alors que les salarié-es réclament des augmentations importantes et justifiées, ainsi qu’un mécanisme pour les protéger face à une inflation hors de contrôle, le gouvernement répond maintenant par une offre de 10,3 % sur cinq ans, sous ses propres prévisions d’inflation et des attaques au régime de retraite. Là où les employé-es réclament des améliorations à leurs conditions de travail comme des outils pour contrer la surcharge et l’épuisement professionnel, et des améliorations à la conciliation famille-travail-études-vie personnelle, les employeurs répondent par des demandes de « souplesse », la possibilité de refuser plus facilement les congés, des horaires de travail plus longs, etc. François Enault est clair « c’était injurieux au moment du dépôt. Après un an sans mouvement significatif, je ne pense pas trouver de mots assez polis pour décrire la situation. Il ne reste qu’une solution pour faire comprendre au gouvernement le sérieux de nos demandes. »